Le jour s’était bel et bien levé à présent et la boulangerie imbibée de cruauté n’était plus qu’une ombre à l’horizon. Hannah commençait à crever sérieusement la dalle.
Caractacus trottinait à ses côtés comme un petit chien docile.
N’en pouvant plus de savoir qu’elle avait deux miches de pain et deux saucissons dans sa sacoche sans qu’elle y pût toucher, elle finit par s’arrêter, les pieds ballotant dans un fossé. Elle coupa le premier saucisson en deux, moitié pour elle, moitié pour son gros chat-chien.
Ainsi finit le premier saucisson.
Il se mit à pleuvoir. Hannah courut sur le bord de la route détrempée. Il n’y avait rien pour s’abriter dans la campagne morne des alentours sauf…Un tas de fumier.
«Puisque je n’ai pas le choix… »
La gamine maigrelette se rua vers le tas. Cependant, son bel enthousiasme s’évanouit à la minute où elle toucha le tas de fumier. Mais les gouttes d’eau glacée ruisselant sur ses épaules la décidèrent ; elle s’enfonça tête la première dans le tas malodorant. D’autant plus que, si elle s’en souvenait bien, le caca avait au moins cet avantage : quand on en faisait un gros tas, ça devenait bien chaud.
Hannah était écœurée mais quand elle se bouchait le nez, c’était effectivement très confortable.
« Je suis vraiment dans la merde. »
Elle attendit que la pluie cesse.
« Cela aurait pu être pire. »
La gamine s’extirpa des déchets.
« Oui...J’aurai pu être morte, aussi. »
Elle regarda autour d’elle. Se baissa, lapa une flaque d’eau. La gamine avait la gorge sèche. Agacée par ses longues tresses qui trempaient dans la flaque, la gamine les trancha avec rage.
Lorsqu’elle laissa retomber son couteau, la flaque brouillée par les herbes et les mottes de terre reflétait une parfaite inconnue.
La fillette contempla avec étonnement ses deux tresses blondes, sales, restées dans ses mains. Elle fourra celles-ci dans sa sacoche. Hannah marcha quelque temps sous le ciel grisâtre. Une voiture passa, soulevant des gerbes de poussière, cahotant sur les pavés disjoints. Un jeune homme et une jeune femme bien habillés, tous propres se trouvaient à l’intérieur.
« Oôôh fit le jeune homme d’une voix de fausset. Regardez-moi cette pauvresse au bord de la route !
-Sainte Vierge, qu’elle est laide et sale s’écria la jeune fille, dégoûtée.
-Tu as raison Délicia ma chérie. Cocher, accélérer, voulez-vous bien ? »
Hannah les vit disparaître au détour du chemin. Elle les regarda, mi-sidérée, mi-blessée.
« Voilà ce que ça fait d’avoir l’air d’une mendiante. »
Elle avait honte. Vraiment honte. Mais lorsque Caractacus jaillit d’un fourré, son sentiment de révolte se dissipa. Le chat poursuivait un rat énorme. Hannah se lança dans la course, son couteau brandi. Caractacus fatiguait mais Hannah n’était même pas essoufflée.
Elle finit par talonner le rat.
Caractacus tentait de lui voler sa proie. Elle donna une beigne au chat pour qu’il abandonne. La bête stoppa net, mortifiée.
Hannah redoublait de rage. Ce rat, c’était son Grand Accomplissement.
« Si j’arrive à le tuer, ça voudra dire que je suis digne de faire ma vie seule. »
Cette phrase s’était imposée à elle et accroissait sa force. Elle attrapa le rat par la queue, la bête se débattait rageusement. La gamine lui tapa dessus avec le manche de son couteau, puis avec le plat de la lame. Hannah ne savait pas que les rats transportaient la peste. Elle ne savait pas ce qu’était la mort. Elle ne la craignait pas.
Le seul Enfer qu’elle connaissait était celui qu’elle vivait en permanence.
Elle ne le craignait plus.
Le sang vole, tache les vêtements, a un goût cuivré, salé…
Hannah ne cessa de frapper que quand le rat tomba, inerte. La chose noire était trempée de sang et de pus.
Caractacus l’attrapa d’un coup de patte. Hannah lui arracha, énervée et trancha le corps déchiqueté en deux. Caractacus s’enfuit avec la moitié qu’on lui avait attribuée.
Hannah remua la moitié de cadavre du bout des doigts.
« Mon Grand Accomplissement, ce qui me séparera à jamais de Mme Carry…Il consiste aussi à manger cette pauvre chose ?
Elle décida que oui.
Sans réfléchir, elle mordit dans les lambeaux de chair à pleines dents. Cela avait un drôle de goût, un goût de métal, un peu répugnant, salé, aigre, étrange et beau.
« Ce n’est pas répugnant. C’est juste très différent de ce que je connais. »
Entretemps, Caractacus était revenu. Il lapait les gouttes de sang maculant les pavés. Hannah recracha quelque os et parla au chat.
« Dire que tu manges ça tout le temps ! »
N’empêche qu’elle avait accompli son Grand Accomplissement…
Elle était ce qu’elle voulait, à présent…
**********
Deux jours plus tard, lorsque Hannah passa devant La chose, elle ne la remarqua pas. Cela ressemblait à un tas de linge sale.
Elle ne la vit pas tout de suite, trop occupée qu’elle était à essayer de forcer avec ses dents le bouchon de la bouteille de lait qu’elle avait volée dans une ferme et à tenter d’endiguer le sang qui coulait de la coupure qu’elle s’était faite à la cheville en laissant tomber un morceau de verre sur son pied. Caractacus la suivait, un truc qui ressemblait à un marcassin mort entre les pattes.
Si Hannah n’avait pas trébuché, rien de ce que je vais vous raconter ne serait arrivé.
Mais elle trébucha et le sang qui jaillissait de sa cheville redoubla de force. La gamine en eut les larmes aux yeux.
« Chat, ramène-moi un bout de tissu du tas sur la route, tu veux ? »
Contre toute attente, le chat s’exécuta. Et le paquet de linge sale remua.
« C’est quoi ce tas ? s’étonna Hannah. Bah, ramène le tissu, Caractacus, on s’en occupera après. »
La gamine s’assit au bord de la route et entreprit de bander sa cheville avec le morceau de nippe. Elle serra avec application, se leva en boitillant et elle ramassa la bouteille qui était miraculeusement restée entière.
Hannah fouilla dans le tas de haillons…
Ses recherches ne furent pas bien longues : en écartant un lambeau de tissu, un visage maigrichon apparut.
« Hey hey petit mec, rigola Hannah. On est tout seul? Qu’est-ce que ça tombe bien, moi aussi. On va faire fortune ensemble ? Je peux quand même pas te laisser dans la merde comme ça. »
Hannah essaya de faire un paquet un tant soit peu compact et facilement transportable et n’y réussit pas du tout. Elle se résolut donc à porter tel quel le tas dans ses bras.
« J’ai l’air d’une lavandière comme ça. »
Elle essaya de suivre l’allure de son imposant compagnon mais le gros tas la ralentissait trop. Hannah finit par s’asseoir dans un fossé à demi rempli d’eau.
Sa jupe fut immédiatement détrempée.
« Je fais quoi ? » demanda t’elle au chat.
Le matou semblait lui dire :
« Baââh, t’as une conscience, moi pas, débrouilles-toi. »
Alors Hannah repensa à ses tresses. Elle les extirpa de sa sacoche et noua approximativement les bouts de tissu avec. Elle dégagea le visage de l’enfant qui la contemplait d’un air surpris.
« Bon ben voilà ! Encombrement minimum ! »
Elle marcha jusqu’à la nuit.
Le gamin du tas gigotait dans ses nippes.
Le soir, Hannah lui donna la moitié de sa bouteille de lait et trempa des morceaux de mie dedans.
Ensuite, elle s’endormit dans un tas de paille.
« Bon, ben, ça s’améliore, ma situation. Un de ces jours, je finirai par dormir dans un vrai lit. Si je ne meurs pas asphyxiée par ma propre odeur avant… »
Il était vrai qu’elle sentait très mauvais. Allez, soyons francs, elle puait un max. L’épisode « tas de fumier » avait laissé de sérieuses séquelles sur le plan olfactif.
Le lendemain, Hannah ôta ses chaussures en lambeaux et se trempa les pieds dans une flaque d’eau. Elle se sécha avec un bout de nippe et contempla ses pieds. Pas top.
Hannah hésitait. Est-ce que ça avait une quelconque différence ?
Oui, un peu…Ça puait un peu moins ? Oui, ça puait moins.
Hannah renouvela l’opération avec ses mains et son visage. Son odeur s’atténuait. C’était toujours ça de gagné…
Elle reprit sa route, sans ses chaussures cette fois. Elle n’allait pas s’attacher à ces pauvres choses qui ne ressemblaient plus à rien. Autant continuer sans ; et un panneau lui avait annoncé qu’elle avait franchi St-Albans peu avant, Londres n’était plus loin.
Un jour, Caractacus ramena un lapereau. Hannah lui donna une tape sur la tête.
« Quand donc comprendras-tu que tu n’es pas un clebs ? »
Le félidé ne comprenait rien…
La campagne était vraiment monotone. Hannah se perdit une fois. En marchant toujours dans la même direction, elle finit par atteindre une voie ferrée. Quand un train de marchandises passa en cahotant, elle grimpa dans le wagon à bestiaux. Ceux-ci ne firent pas attention à elle : elle puait aussi fort qu’eux, si ce n’était plus.
En lorgnant les étoiles, les jambes frôlant la voie ferrée, ballottant dans le vide, Hannah commença à mesurer sa chance.
« Je pue. J’ai faim, je mange des rats, je croque les cadavres. Je suis sale. J’ai la colique. Je meurs de froid. Mais j’en ai rien à battre, rien à battre. Parce que je suis libre. »
Alors Hannah hurla, de toute la force de ses poumons, de toute son âme, réveillant le bébé et faisant peur aux vaches du wagon.
« Je suis liiiibre ! Je bois du sang, je suis une bête, et je suis heureuse ! Parce que je suis libre ! Parce que je peux choisir ce que je ferais de demain ! »
Plusieurs miles plus tard, elle sautait en marche. Caractacus ramenait des animaux et partageai avec Hannah.
Le temps s’écoulait doucement.
Hannah baptisa le bébé qu’elle avait trouvé Lockie.
Le chat-chien, la gamine et le môme arrivèrent à Londres un jour de pluie.
Caractacus trottinait à ses côtés comme un petit chien docile.
N’en pouvant plus de savoir qu’elle avait deux miches de pain et deux saucissons dans sa sacoche sans qu’elle y pût toucher, elle finit par s’arrêter, les pieds ballotant dans un fossé. Elle coupa le premier saucisson en deux, moitié pour elle, moitié pour son gros chat-chien.
Ainsi finit le premier saucisson.
Il se mit à pleuvoir. Hannah courut sur le bord de la route détrempée. Il n’y avait rien pour s’abriter dans la campagne morne des alentours sauf…Un tas de fumier.
«Puisque je n’ai pas le choix… »
La gamine maigrelette se rua vers le tas. Cependant, son bel enthousiasme s’évanouit à la minute où elle toucha le tas de fumier. Mais les gouttes d’eau glacée ruisselant sur ses épaules la décidèrent ; elle s’enfonça tête la première dans le tas malodorant. D’autant plus que, si elle s’en souvenait bien, le caca avait au moins cet avantage : quand on en faisait un gros tas, ça devenait bien chaud.
Hannah était écœurée mais quand elle se bouchait le nez, c’était effectivement très confortable.
« Je suis vraiment dans la merde. »
Elle attendit que la pluie cesse.
« Cela aurait pu être pire. »
La gamine s’extirpa des déchets.
« Oui...J’aurai pu être morte, aussi. »
Elle regarda autour d’elle. Se baissa, lapa une flaque d’eau. La gamine avait la gorge sèche. Agacée par ses longues tresses qui trempaient dans la flaque, la gamine les trancha avec rage.
Lorsqu’elle laissa retomber son couteau, la flaque brouillée par les herbes et les mottes de terre reflétait une parfaite inconnue.
La fillette contempla avec étonnement ses deux tresses blondes, sales, restées dans ses mains. Elle fourra celles-ci dans sa sacoche. Hannah marcha quelque temps sous le ciel grisâtre. Une voiture passa, soulevant des gerbes de poussière, cahotant sur les pavés disjoints. Un jeune homme et une jeune femme bien habillés, tous propres se trouvaient à l’intérieur.
« Oôôh fit le jeune homme d’une voix de fausset. Regardez-moi cette pauvresse au bord de la route !
-Sainte Vierge, qu’elle est laide et sale s’écria la jeune fille, dégoûtée.
-Tu as raison Délicia ma chérie. Cocher, accélérer, voulez-vous bien ? »
Hannah les vit disparaître au détour du chemin. Elle les regarda, mi-sidérée, mi-blessée.
« Voilà ce que ça fait d’avoir l’air d’une mendiante. »
Elle avait honte. Vraiment honte. Mais lorsque Caractacus jaillit d’un fourré, son sentiment de révolte se dissipa. Le chat poursuivait un rat énorme. Hannah se lança dans la course, son couteau brandi. Caractacus fatiguait mais Hannah n’était même pas essoufflée.
Elle finit par talonner le rat.
Caractacus tentait de lui voler sa proie. Elle donna une beigne au chat pour qu’il abandonne. La bête stoppa net, mortifiée.
Hannah redoublait de rage. Ce rat, c’était son Grand Accomplissement.
« Si j’arrive à le tuer, ça voudra dire que je suis digne de faire ma vie seule. »
Cette phrase s’était imposée à elle et accroissait sa force. Elle attrapa le rat par la queue, la bête se débattait rageusement. La gamine lui tapa dessus avec le manche de son couteau, puis avec le plat de la lame. Hannah ne savait pas que les rats transportaient la peste. Elle ne savait pas ce qu’était la mort. Elle ne la craignait pas.
Le seul Enfer qu’elle connaissait était celui qu’elle vivait en permanence.
Elle ne le craignait plus.
Le sang vole, tache les vêtements, a un goût cuivré, salé…
Hannah ne cessa de frapper que quand le rat tomba, inerte. La chose noire était trempée de sang et de pus.
Caractacus l’attrapa d’un coup de patte. Hannah lui arracha, énervée et trancha le corps déchiqueté en deux. Caractacus s’enfuit avec la moitié qu’on lui avait attribuée.
Hannah remua la moitié de cadavre du bout des doigts.
« Mon Grand Accomplissement, ce qui me séparera à jamais de Mme Carry…Il consiste aussi à manger cette pauvre chose ?
Elle décida que oui.
Sans réfléchir, elle mordit dans les lambeaux de chair à pleines dents. Cela avait un drôle de goût, un goût de métal, un peu répugnant, salé, aigre, étrange et beau.
« Ce n’est pas répugnant. C’est juste très différent de ce que je connais. »
Entretemps, Caractacus était revenu. Il lapait les gouttes de sang maculant les pavés. Hannah recracha quelque os et parla au chat.
« Dire que tu manges ça tout le temps ! »
N’empêche qu’elle avait accompli son Grand Accomplissement…
Elle était ce qu’elle voulait, à présent…
**********
Deux jours plus tard, lorsque Hannah passa devant La chose, elle ne la remarqua pas. Cela ressemblait à un tas de linge sale.
Elle ne la vit pas tout de suite, trop occupée qu’elle était à essayer de forcer avec ses dents le bouchon de la bouteille de lait qu’elle avait volée dans une ferme et à tenter d’endiguer le sang qui coulait de la coupure qu’elle s’était faite à la cheville en laissant tomber un morceau de verre sur son pied. Caractacus la suivait, un truc qui ressemblait à un marcassin mort entre les pattes.
Si Hannah n’avait pas trébuché, rien de ce que je vais vous raconter ne serait arrivé.
Mais elle trébucha et le sang qui jaillissait de sa cheville redoubla de force. La gamine en eut les larmes aux yeux.
« Chat, ramène-moi un bout de tissu du tas sur la route, tu veux ? »
Contre toute attente, le chat s’exécuta. Et le paquet de linge sale remua.
« C’est quoi ce tas ? s’étonna Hannah. Bah, ramène le tissu, Caractacus, on s’en occupera après. »
La gamine s’assit au bord de la route et entreprit de bander sa cheville avec le morceau de nippe. Elle serra avec application, se leva en boitillant et elle ramassa la bouteille qui était miraculeusement restée entière.
Hannah fouilla dans le tas de haillons…
Ses recherches ne furent pas bien longues : en écartant un lambeau de tissu, un visage maigrichon apparut.
« Hey hey petit mec, rigola Hannah. On est tout seul? Qu’est-ce que ça tombe bien, moi aussi. On va faire fortune ensemble ? Je peux quand même pas te laisser dans la merde comme ça. »
Hannah essaya de faire un paquet un tant soit peu compact et facilement transportable et n’y réussit pas du tout. Elle se résolut donc à porter tel quel le tas dans ses bras.
« J’ai l’air d’une lavandière comme ça. »
Elle essaya de suivre l’allure de son imposant compagnon mais le gros tas la ralentissait trop. Hannah finit par s’asseoir dans un fossé à demi rempli d’eau.
Sa jupe fut immédiatement détrempée.
« Je fais quoi ? » demanda t’elle au chat.
Le matou semblait lui dire :
« Baââh, t’as une conscience, moi pas, débrouilles-toi. »
Alors Hannah repensa à ses tresses. Elle les extirpa de sa sacoche et noua approximativement les bouts de tissu avec. Elle dégagea le visage de l’enfant qui la contemplait d’un air surpris.
« Bon ben voilà ! Encombrement minimum ! »
Elle marcha jusqu’à la nuit.
Le gamin du tas gigotait dans ses nippes.
Le soir, Hannah lui donna la moitié de sa bouteille de lait et trempa des morceaux de mie dedans.
Ensuite, elle s’endormit dans un tas de paille.
« Bon, ben, ça s’améliore, ma situation. Un de ces jours, je finirai par dormir dans un vrai lit. Si je ne meurs pas asphyxiée par ma propre odeur avant… »
Il était vrai qu’elle sentait très mauvais. Allez, soyons francs, elle puait un max. L’épisode « tas de fumier » avait laissé de sérieuses séquelles sur le plan olfactif.
Le lendemain, Hannah ôta ses chaussures en lambeaux et se trempa les pieds dans une flaque d’eau. Elle se sécha avec un bout de nippe et contempla ses pieds. Pas top.
Hannah hésitait. Est-ce que ça avait une quelconque différence ?
Oui, un peu…Ça puait un peu moins ? Oui, ça puait moins.
Hannah renouvela l’opération avec ses mains et son visage. Son odeur s’atténuait. C’était toujours ça de gagné…
Elle reprit sa route, sans ses chaussures cette fois. Elle n’allait pas s’attacher à ces pauvres choses qui ne ressemblaient plus à rien. Autant continuer sans ; et un panneau lui avait annoncé qu’elle avait franchi St-Albans peu avant, Londres n’était plus loin.
Un jour, Caractacus ramena un lapereau. Hannah lui donna une tape sur la tête.
« Quand donc comprendras-tu que tu n’es pas un clebs ? »
Le félidé ne comprenait rien…
La campagne était vraiment monotone. Hannah se perdit une fois. En marchant toujours dans la même direction, elle finit par atteindre une voie ferrée. Quand un train de marchandises passa en cahotant, elle grimpa dans le wagon à bestiaux. Ceux-ci ne firent pas attention à elle : elle puait aussi fort qu’eux, si ce n’était plus.
En lorgnant les étoiles, les jambes frôlant la voie ferrée, ballottant dans le vide, Hannah commença à mesurer sa chance.
« Je pue. J’ai faim, je mange des rats, je croque les cadavres. Je suis sale. J’ai la colique. Je meurs de froid. Mais j’en ai rien à battre, rien à battre. Parce que je suis libre. »
Alors Hannah hurla, de toute la force de ses poumons, de toute son âme, réveillant le bébé et faisant peur aux vaches du wagon.
« Je suis liiiibre ! Je bois du sang, je suis une bête, et je suis heureuse ! Parce que je suis libre ! Parce que je peux choisir ce que je ferais de demain ! »
Plusieurs miles plus tard, elle sautait en marche. Caractacus ramenait des animaux et partageai avec Hannah.
Le temps s’écoulait doucement.
Hannah baptisa le bébé qu’elle avait trouvé Lockie.
Le chat-chien, la gamine et le môme arrivèrent à Londres un jour de pluie.
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